Discours au sujet de l'étude du Comité ETHI sur la Loi sur l'accès à l'information
Comparuation devant le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes (ETHI)
par Suzanne Legault, commissaire à l'information du Canada
Le 19 mai 2016
Ottawa (Ontario)
(Le discours prononcé fait foi)
Monsieur le Président, merci de m'avoir invitée à m'adresser au Comité dans le cadre de son étude sur la Loi sur l'accès à l'information.
J'ai suivi de près votre travail, j'ai pris connaissance des témoignages des divers témoins et j'ai lu les soumissions que vous avez reçues au cours de votre étude. En peu de temps, vous avez recueilli une quantité importante de renseignements qui orienteront vos réflexions.
Je suis également consciente de l'annonce récente du gouvernement concernant l'adoption d'une approche en deux phases pour améliorer le régime d'accès à l'information. La première phase consisterait à déposer au Parlement un projet de loi en accord avec la lettre de mandat du président du Conseil du Trésor, avec quelques ajouts. Le gouvernement consulte actuellement les Canadiens au sujet de quelques propositions liées à cette première phase. La deuxième phase impliquerait un examen plus approfondi de la Loi, qui débuterait en 2018 et serait effectué tous les cinq ans.
Monsieur le Président, malgré que je comprenne le désir du gouvernement à respecter rapidement ses promesses spécifiques, cette approche me déçoit. Notre Loi sur l'accès à l'information est manifestement désuète, en plus d'être largement devancée à l'échelle nationale et internationale. La Loi ne trouve pas le juste équilibre entre le droit du public d'accéder à l'information et la nécessité du gouvernement de protéger certains renseignements. La mise en œuvre des recommandations formulées dans mon rapport spécial intitulé Viser juste pour la transparence rétablirait cet équilibre essentiel. Elles permettraient de ramener le Canada au premier plan en ce qui a trait aux lois sur l'accès à l'information.
Les recommandations dans mon rapport sont ancrées dans les normes les plus élevées et les pratiques exemplaires sur le plan de la législation en matière d'accès à l'information, lesquelles proviennent des lois d'autres administrations, de lois types et de guides, ainsi que de rapports de haut niveau sur la réforme de l'accès à l'information.
Toutefois, afin d'aider le Comité, tandis qu'il se prépare à produire son rapport sur son étude de la Loi, j'ai sélectionné les recommandations auxquelles, selon moi, on devrait accorder la priorité.
Ces priorités ont été sélectionnées pour leur plus grande contribution à la transparence du gouvernement. Les voici, en ordre :
- Champ d'application
- Obligation de documenter
- Respect des délais
- Promotion d'une divulgation maximale
- Surveillance
- Examen périodique obligatoire
Champ d'application de la Loi
Élargir la portée de la Loi aux cabinets ministériels et aux institutions qui soutiennent le Parlement et les tribunaux représente un grand pas dans la bonne direction pour assurer une meilleure reddition de comptes et une transparence accrue.
Cabinets ministériels
Les ministres et leurs secrétaires parlementaires, les ministres d'État et le premier ministre sont des titulaires de charges publiques qui prennent des décisions qui ont des incidences sur les Canadiens. Ces décisions influent aussi sur la façon dont l'argent des contribuables est dépensé. Il incombe aux ministres (et à leur personnel) de se montrer responsables en divulguant des renseignements relatifs à l'administration de leur ministère ou à leurs autres responsabilités.
Recommandation 1.2
La commissaire à l’information recommande d’étendre le champ d’application de la Loi au Cabinet du Premier ministre, aux cabinets des ministres et aux cabinets des ministres d’État, ainsi qu’aux secrétaires parlementaires.
Recommandation 1.3
La commissaire à l’information recommande qu’une nouvelle exception, relative aux fonctions parlementaires des ministres et des ministres d’État, ainsi que des secrétaires parlementaires en tant que députés, figure dans la Loi.
Parlement
Le Parlement n'est pas visé par la Loi, mais le budget combiné de la Chambre des communes, du Sénat et de la Bibliothèque du Parlement en 2014-2015 s'élevait à plus de 500 millions de dollars.
Recommandation 1.4
La commissaire à l’information recommande que le champ d’application de la Loi s’étende aux organismes de soutien du Parlement, tels que le Bureau de régie interne, la Bibliothèque du Parlement, le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique et le commissaire à l’éthique du Sénat.
Recommandation 1.5
La commissaire à l’information recommande l’ajout à la Loi d’une nouvelle disposition visant à prévenir une atteinte au privilège parlementaire.
Les tribunaux
La situation est similaire pour ce qui est des organes de soutien administratif des tribunaux. En 2014-2015, le budget combiné de la Cour suprême du Canada, du bureau du registraire de la Cour suprême du Canada, du Service administratif des tribunaux judiciaires, du Bureau du commissaire à la magistrature fédérale et du Conseil canadien de la magistrature s'élevait à plus de 600 millions de dollars.
Recommandation 1.6
La commissaire à l’information recommande d’élargir le champ d’application de la Loi afin d’y assujettir les organismes de soutien administratif des tribunaux, tels que le registraire de la Cour suprême du Canada, le Service administratif des tribunaux judiciaires, le Commissariat à la magistrature fédérale Canada et le Conseil canadien de la magistrature.
Recommandation 1.7
La commissaire à l’information recommande que la Loi exclue les documents contenus dans les dossiers de la Cour, les documents et les notes personnelles des juges, ainsi que les communications ou les avant-projets d’ordonnance préparés par ou pour des personnes ayant une capacité judiciaire ou quasi judiciaire.
Pour garantir la reddition de comptes et la transparence de ces institutions, celles-ci doivent être visées par la Loi. Je recommande donc au Comité de prioriser l'élargissement de la portée de la Loi aux cabinets ministériels et aux institutions qui soutiennent le Parlement et les tribunaux.
Obligation de documenter
L'accès à l'information repose sur de bonnes pratiques en matière de tenue de dossiers et de gestion de l'information. En l'absence de documents, les droits que confère la Loi sont bafoués. Une obligation légale de documenter, assortie de sanctions adéquates en cas de non-conformité, constitue une modification essentielle dans la protection du droit d'accès.
Une obligation légale de documenter le processus décisionnel protège les droits d'accès à l'information en :
- créant des documents officiels;
- facilitant une meilleure gouvernance;
- augmentant la responsabilisation;
- assurant un héritage historique des décisions du gouvernement.
Sans obligation légale, il y a un risque réel – et nous l'avons constaté dans nos enquêtes – que toute l'information relative au processus décisionnel ne soit pas consignée ou préservée de manière appropriée.
Mes collègues des provinces et des territoires ainsi que moi-même avons présenté un certain nombre de résolutions conjointes à nos gouvernements respectifs pour conférer une obligation légale de documenter.
Je vous invite à accorder la priorité à cette modification. Je recommande donc une obligation légale exhaustive de documenter avec des sanctions appropriées en cas de non-conformité.
Recommandation 2.1
La commissaire à l’information recommande l’instauration d’une obligation légale exhaustive de documenter avec des sanctions appropriées en cas de non-conformité.
Recommandation 7.3
La commissaire à l’information recommande que l’omission de documenter ou de conserver des documents pour étayer les processus décisionnels dans le but d’entraver le droit à l’accès (ou le fait d’ordonner ou de proposer à une personne de commettre un de ces actes, ou de l’amener à le faire) soit interdits en vertu de la Loi.
Respect des délais
L’accès à l’information en temps opportun est un pilier de tout régime d’accès à l’information. Les problèmes de délais ne datent pas d’hier dans notre régime d’accès à l’information. Les demandeurs se plaignent souvent de retards. Les enquêtes concernant ces plaintes ont révélé une culture du retard dans l’ensemble du système d’accès à l’information.
Au chapitre 3 de mon rapport sur la modernisation, je formule plusieurs recommandations pour inverser la culture du retard qui a affaibli le droit d’accès. Parmi celles-ci figure la limitation des prorogations de délai au strict nécessaire d’après un calcul rigoureux, logique et soutenable, jusqu’à un maximum de 60 jours. Il faudra obtenir la permission de mon bureau pour se prévaloir de prorogations plus longues. Les recommandations visent également à diminuer les retards attribuables à la consultation d’autres institutions, d’autres juridictions et de tierces parties.
Monsieur le Président, tout le monde gagne à résoudre les problèmes de délais. Les demandeurs recevront de l’information pertinente et utile; les institutions seront moins occupées à répondre à des plaintes qui prennent beaucoup de temps et qui sont constamment en concurrence avec le traitement des demandes; et mes enquêteurs peuvent concentrer leurs efforts sur le règlement des plaintes de refus. Environ 40 % de ma charge de travail est consacrée aux plaintes administratives concernant les retards. La grande majorité de ces plaintes sont fondées. Je recommande donc de remédier aux délais par la mise en œuvre de la série de recommandations contenue dans mon rapport.
Recommandation 3.1
La commissaire à l’information recommande de limiter les prorogations au strict nécessaire, jusqu’à une durée maximale de 60 jours, selon un calcul suffisamment rigoureux, logique et soutenable afin de passer l’épreuve lors d’un examen de leur caractère raisonnable.
Recommandation 3.2
La commissaire à l’information recommande que les prorogations supérieures à 60 jours soient disponibles avec la permission du commissaire à l’information lorsque cela est raisonnable et justifié dans les circonstances et lorsque la prorogation demandée est selon un calcul suffisamment rigoureux, logique et soutenable afin de passer l’épreuve lors d’un examen de leur caractère raisonnable.
Recommandation 3.3
La commissaire à l’information recommande que les institutions soient autorisées, avec la permission de la commissaire, à recourir à une prorogation lorsqu’elles reçoivent de multiples demandes de la part d’un demandeur dans une période de 30 jours, et lorsque le traitement de ces demandes entraverait de façon sérieuse le fonctionnement de l’institution.
Recommandation 3.4
La commissaire à l’information recommande que la Loi stipule explicitement que l’on peut recourir à des prorogations pour les consultations conformément à l’alinéa 9(1)b) uniquement pour consulter d’autres institutions gouvernementales ou parties concernées, autres que des tiers qui disposent déjà de droits de consultation en vertu de l’alinéa 9(1)c), et uniquement lorsque cela est nécessaire pour traiter la demande.
Recommandation 3.5
La commissaire à l’information recommande que, dans les cas où une partie consultée ne répond pas à une demande de consultation, l’institution effectuant la consultation doit traiter la demande dans les délais prévus par la Loi.
Recommandation 3.6
La commissaire à l’information recommande que l’on présume qu’un tiers consent à divulguer ses renseignements lorsqu’il ne répond pas dans les délais prescrits à un avis selon lequel une institution le prévient de son intention de communiquer ses renseignements.
Recommandation 3.7
La commissaire à l’information recommande d’autoriser une prorogation dans les cas où les renseignements demandés doivent être rendus publics, au lieu d’appliquer une exception.
Recommandation 3.8
La commissaire à l’information recommande que si l’institution a recours à une prorogation parce que les renseignements doivent être rendus publics, l’institution devrait être tenue de divulguer les renseignements s’ils ne sont pas publiés d’ici l’expiration de la prorogation.
Recommandation 3.9
La commissaire à l’information recommande d’abroger l’exception visant les renseignements devant être publiés (article 26).
Recommandation 3.10
La commissaire à l’information recommande que les avis de prorogation contiennent les renseignements suivants :
- le paragraphe auquel on se fie pour la prorogation et les motifs pour lesquels le paragraphe est d’application;
- la durée de la prorogation (peu importe en vertu de quel paragraphe on a eu recours à la prorogation);
- la date à laquelle on déclarera la présomption de refus pour l’institution si elle ne répond pas;
- une déclaration selon laquelle le demandeur a le droit de porter plainte devant le commissaire à l’information au sujet de la prorogation dans les 60 jours suivant la réception de l’avis de prorogation;
- une déclaration selon laquelle le demandeur a le droit de porter plainte devant le commissaire à l’information dans les 60 jours suivant la date de la présomption de refus si l’institution ne répond pas à la demande avant la date d’expiration de la prorogation.
Promotion d'une divulgation maximale
La Loi prévoit que l'information détenue par le gouvernement doit être accessible au public, sous réserve d'exceptions limitées et spécifiques, et que toute décision concernant la divulgation doit faire l’objet d’un examen indépendant du gouvernement.
Cependant, en vertu de la Loi, de nombreuses exceptions ne sont pas suffisamment limitées ou précises. Aussi, la Loi prévoit des exclusions, dont l'application est dispensée d'un examen indépendant.
Comme priorité, le Comité doit trouver une solution à l'exception relative aux avis et recommandations et à l'exclusion s'appliquant aux documents confidentiels du Cabinet.
Article 21 : Avis et recommandations
L'élaboration des politiques et la prise de décisions sont au cœur de l'action du gouvernement. Bien qu'il soit d'intérêt public d'assurer la protection des avis complets, donnés en toute liberté et en toute franchise, par les fonctionnaires, il est tout aussi important, dans l'intérêt public, de fournir aux citoyens les renseignements dont ils ont besoin pour participer aux processus d'élaboration des politiques et de prise de décisions. Ces renseignements sont nécessaires pour établir d'un dialogue constructif avec le gouvernement et demander des comptes au gouvernement relativement à ses décisions.
En vertu de l'exception actuelle relative aux avis et recommandations, les renseignements relatifs aux priorités, aux politiques et aux décisions sont largement protégés contre la divulgation.
Afin de limiter son application pour protéger seulement les intérêts en jeu, cette exception doit être restreinte pour s'appliquer que dans les cas où la divulgation risquerait de causer du tort. La portée et la durée de cette exception devraient également être limitées.
Je recommande donc que la modification de cette exception soit traitée de façon prioritaire, si le gouvernement veut donner suite à son programme en matière de transparence et de responsabilisation.
Recommandation 4.21
La commissaire à l'information recommande d'inclure à l'exception s'appliquant aux avis et aux recommandations un critère relatif au risque vraisemblable de préjudice.
Recommandation 4.22
La commissaire à l'information recommande d'exclure expressément du champ d'application de l'exception relative aux avis et aux recommandations les données factuelles, sondages d'opinion, enquêtes statistiques, évaluations, prévisions économiques et directives ou lignes directrices à l'intention des employés d'une institution publique.
Recommandation 4.23
La commissaire à l'information recommande de réduire la période prévue dans l'exception relative aux avis et aux recommandations, de façon à ce qu'elle prenne fin au bout de cinq ans ou une fois qu'une décision a été prise, selon la première éventualité.
Documents confidentiels du Cabinet
Le Cabinet est chargé d'établir les politiques et les priorités du gouvernement du Canada. Les ministres doivent être en mesure de discuter de questions au sein du Cabinet en privé. Par conséquent, la nécessité de protéger le processus décisionnel ou les délibérations du Cabinet est bien établie.
Cependant, à l'heure actuelle, les documents confidentiels du Cabinet sont exclus du droit d'accès à l'information en vertu de la Loi, sous réserve de certaines exceptions limitées. L'exclusion telle qu'elle est formulée est trop large et elle va au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger les délibérations du Cabinet.
Je recommande donc que l'exclusion des documents confidentiels du Cabinet doive être abrogée et remplacée par une exception obligatoire limitée lorsque la divulgation révélerait la teneur des délibérations du Cabinet. Cela permettrait à la commissaire d'exercer sa fonction en matière d'examen indépendant.
Recommandation 4.2
La commissaire à l'information recommande que l'ensemble des exclusions énoncées dans la Loi soit abrogé et remplacé par des exceptions, le cas échéant.
Recommandation 4.26
La commissaire à l'information recommande une exception obligatoire visant les documents confidentiels du Cabinet, lorsque la divulgation révélera la teneur des délibérations du Cabinet.
Recommandation 4.27
La commissaire à l'information recommande que l'exception visant les documents confidentiels du Cabinet ne s'applique pas :
- aux renseignements purement factuels et généraux;
- aux analyses de problèmes et aux options politiques aux fins d'examen;
- aux renseignements contenus dans un document concernant une décision prise par le Cabinet ou l'un de ses comités dans un appel dans le cadre de la Loi;
- aux renseignements contenus dans un document qui existent depuis 15 ans ou plus;
- lorsque le consentement est obtenu pour divulguer les renseignements.
Recommandation 4.28
La commissaire à l'information recommande que les enquêtes sur le refus de communiquer conformément à l'exception visant les documents confidentiels du Cabinet soient déléguées à un nombre limité de cadres ou d’employés désignés au sein de son bureau.
Primauté de l’intérêt public
Une disposition concernant la primauté de l'intérêt public permet de trouver un juste milieu entre le droit du public à l'information et l'intérêt protégé par l'exception. En effet, tenir compte de l'intérêt du public doit devenir un réflexe automatique au moment de déterminer si la non-divulgation de renseignements est appropriée et nécessaire.
Je suggère également une liste de facteurs à prendre en compte pour soupeser l'intérêt public pour la divulgation de l'information. Ceux-ci comprennent l'engagement d'ouverture pris par le gouvernement ainsi que les effets sur l'environnement, la santé ou la sécurité publique. Cette liste non exhaustive peut aussi comprendre d'autres facteurs importants tels que les droits des populations autochtones.
Il est primordial que cette omission dans la Loi soit rectifiée afin d'assurer un juste équilibre entre des intérêts contradictoires.
Je recommande donc, à titre de priorité, qu'une disposition relative à la primauté de l’intérêt public soit incluse dans la Loi.
Recommandation 4.1
La commissaire à l'information préconise l'inclusion dans la Loi d'une disposition de primauté de l'intérêt public applicable à l'ensemble des exceptions qui s'accompagnerait de l'obligation de prendre en compte la liste non exhaustive suivante de facteurs :
- les objectifs du gouvernement ouvert;
- les effets sur l'environnement, la santé ou la sécurité publique;
- le fait que les renseignements révèlent des abus des droits à la personne ou permettraient de protéger le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité d'une personne.
Surveillance
Modèle exécutoire
J'ai formulé un certain nombre de recommandations pour renforcer la surveillance du droit d'accès. À mon avis, le modèle le plus efficace est le modèle exécutoire, dans le cadre duquel les ordonnances sont assujetties à un examen judiciaire par la Cour fédérale. Ce modèle comprendrait de la médiation et de solides pouvoirs d'enquête, le pouvoir discrétionnaire d’entendre les appels, ainsi que l'attestation des ordonnances au même titre que si celles-ci émanaient de la Cour fédérale.
Les avantages associés à ce modèle sont clairs et indiscutables :
- les ordonnances de la commissaire créeraient une jurisprudence qui augmente au fil du temps. Les demandeurs et les institutions auraient alors des directives claires quant à la position de la commissaire sur les obligations des institutions en vertu de la Loi. La jurisprudence réduirait aussi la probabilité selon laquelle la commissaire devrait examiner les questions ayant déjà été jugées.
- il incite clairement les institutions à appliquer des exceptions uniquement lorsqu'elles disposent de preuves suffisantes pour soutenir la non-divulgation et à soumettre ensuite ces preuves à l’adjudicateur, comme le contrôle judiciaire devant la Cour est basé sur le document soumis à l’adjudicateur;
- les motifs selon lesquels l'ordonnance peut être mise de côté sont limités et l'institution ne peut présenter de nouvelles preuves ou compter sur de nouvelles exceptions, car c'est la décision de l’adjudicateur, et non celle de l'institution, qui est en cours d'examen devant la Cour;
- cela évite la redondance d'avoir deux niveaux d'examen de la même décision, ce qui peut donner lieu à un accès à l'information plus opportun;
- le fardeau lié à la demande d'un contrôle judiciaire devant la Cour repose sur les institutions et non sur les demandeurs, si l'institution souhaite s'opposer à la divulgation ordonnée par un adjudicateur;
- il a un caractère définitif pour les demandeurs, car les ordonnances de l’adjudicateur sont exécutoires, sauf si elles sont examinées par la Cour.
En résumé, ce modèle améliore le respect des délais, inculque la discipline et s'avère un vecteur de prévisibilité.
Recommandation 5.1
La commissaire à l’information recommande le renforcement de la surveillance du droit d’accès en adoptant un modèle exécutoire.
Recommandation 5.2
La commissaire à l’information recommande de conférer au commissaire à l’information un pouvoir discrétionnaire d’entendre les appels.
Recommandation 5.3
La commissaire à l’information recommande que la Loi prévoie l’autorisation expresse de résoudre les appels par médiation.
Recommandation 5.4
La commissaire à l’information recommande que toute ordonnance du commissaire à l’information soit certifiée par la Cour fédérale.
Recommandation 5.7
La commissaire à l’information recommande que la Loi maintienne les pouvoirs d’enquête existants du commissaire à l’information.
Autres pouvoirs
Le modèle de surveillance qu'on trouve dans la Loi doit être complété par d'autres pouvoirs pour voir son efficacité maximisée. Ces pouvoirs incluent notamment la capacité d'effectuer des audits de conformité à la Loi auprès des institutions, de mener à bien des activités éducatives, de diriger ou de financer la recherche, d'émettre des avis sur la législation, les programmes et les activités qui ont des répercussions sur les droits d'accès à l'information.
Recommandation 5.5
La commissaire à l’information recommande que la Loi maintienne le pouvoir de déposer des enquêtes en rapport avec les droits à l’information.
Recommandation 5.6
La commissaire à l’information recommande que la Loi prévoie le pouvoir de mener des audits de conformité des institutions par rapport à la Loi.
Recommandation 5.8
La commissaire à l’information recommande que la Loi prévoie le pouvoir de mener des activités de sensibilisation.
Recommandation 5.9
La commissaire à l’information recommande que la Loi prévoie le pouvoir de mener ou de financer des recherches.
Recommandation 5.10
La commissaire à l’information recommande que le gouvernement soit tenu de consulter le commissaire à l’information au sujet de toutes les propositions de loi qui pourraient avoir des répercussions sur l’accès à l’information.
Recommandation 5.11
La commissaire à l’information recommande que les institutions soient tenues de soumettre au commissaire à l’information des évaluations des répercussions sur l’accès à l’information, de façon proportionnée par rapport au niveau de risque défini pour les droits en matière d’accès à l’information, avant d’établir tout nouveau programme ou activité ou d’apporter des modifications importantes aux programmes ou activités existants impliquant les droits en matière d’accès à l’information.
Je recommande donc un modèle exécutoire complet, ce qui placera le Canada au premier plan en ce qui a trait aux lois sur l'accès à l'information.
Examen périodique obligatoire de la Loi
Si le Parlement décide d’adopter une approche à deux étapes pour réformer la Loi sur l’accès à l’information, à la première étape, les dispositions législatives doivent inclure un examen obligatoire en 2018 et aux cinq ans par la suite. Un examen exhaustif serait donc bel et bien effectué en 2018.
Recommandation 8.1
La commissaire à l’information recommande de procéder à un examen parlementaire obligatoire de la Loi tous les cinq ans et de déposer un rapport au Parlement à ce sujet.
Enfin, Monsieur le Président, je tiens à réitérer que la Loi n’est plus à la hauteur des normes d’aujourd’hui, de sorte que les droits des Canadiens en matière d’information ne sont pas protégés adéquatement. J’estime qu’une réforme complète de la Loi est nécessaire depuis longtemps et devrait être entreprise sans tarder pour tenir compte des réalités du 21e siècle dans le domaine de l’information. Au cours des 30 dernières années, il y a eu bien des études, des débats et des consultations, et des centaines de lois ont été examinées. Il faut maintenant prendre des décisions stratégiques pour réformer la Loi.
Monsieur le Président, comme je l’ai déjà déclaré, la Loi ne permet pas de bien concilier le droit à l’information de la population et le besoin, pour le gouvernement, de protéger l’information. Il est temps d’agir fermement pour assurer la protection des droits d’accès des Canadiens.
Je répondrai avec plaisir à vos questions.