Emploi et Développement social Canada (Re), 2022 CI 33
Date : 2022-07-11
Numéro de dossier du Commissariat : 5819-04288
Numéro de dossier de l’institution : A-2016-02113/JL
Sommaire
La partie plaignante allègue qu’Emploi et Développement social Canada (EDSC) a erronément refusé de communiquer des renseignements en réponse à une demande d’accès visant des renseignements relatifs au contrat 100004587 pour les services d’un consultant bilingue en accès à l’information et en protection des renseignements personnels de niveau supérieur. EDSC a refusé de divulguer des parties des documents demandés en vertu du paragraphe 19(1) (renseignements personnels), de l’alinéa 20(1)c) (pertes ou profits financiers d’un tiers), de l’alinéa 21(1)b) (comptes rendus de consultations ou de délibérations), de l’article 23 (secret professionnel de l’avocat et privilège relatif à un litige) et du paragraphe 24(1) (communication restreinte par une autre loi) de la Loi sur l’accès à l’information.
EDSC n’a pas été en mesure de démontrer que le refus de communiquer les renseignements dans un CV qui se rapportaient au poste, aux fonctions et aux responsabilités d’une contractuelle/employée du gouvernement en vertu de l’exception prévue au paragraphe19(1) était justifié. EDSC n’a pas démontré non plus qu’il avait fait des efforts raisonnables pour obtenir le consentement de communiquer des renseignements personnels, que certains renseignements de tiers satisfaisaient aux critères de l’alinéa 20(1)c) et que certains renseignements satisfaisaient aux critères de l’alinéa 21(1)b).
La Commissaire à l’information a ordonné à EDSC de communiquer les renseignements qui, selon ses conclusions, ne satisfaisaient pas aux critères des exceptions et d’établir si la circonstance décrite à l’alinéa 19(2)a) existe.
EDSC a avisé la Commissaire qu’il donnerait suite à l’ordonnance.
La plainte est fondée.
Plainte
[1] La partie plaignante allègue qu’Emploi et Développement social Canada (EDSC) a erronément refusé de communiquer des renseignements en réponse à une demande d’accès visant des renseignements relatifs au contrat 100004587 pour les services d’un consultant bilingue en accès à l’information et en protection des renseignements personnels de niveau supérieur.EDSC a refusé de divulguer des parties des documents demandés en vertu du paragraphe 19(1) (renseignements personnels), de l’alinéa 20(1)c) (pertes ou profits financiers d’un tiers), de l’alinéa 21(1)b) (comptes rendus de consultations ou de délibérations), de l’article 23 (secret professionnel de l’avocat) et du paragraphe 24(1) (communication restreinte par une autre loi) de la Loi sur l’accès à l’information.
Enquête
[2] Lorsqu’une institution refuse de communiquer des renseignements, y compris des renseignements se rapportant à un ou des tiers, il incombe à ces tiers et/ou à l’institution de démontrer que ce refus est justifié.
Paragraphe 19(1) : renseignements personnels
[3] Le paragraphe 19(1) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements personnels.
[4] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements concernent une personne, c’est-à-dire un être humain, et non une société;
- il y a de fortes possibilités que la divulgation de ces renseignements permette d’identifier cette personne;
- les renseignements ne sont pas assujettis à une des exceptions prévues aux alinéas 3j) à 3m) de la Loi sur la protection des renseignements personnels applicables à la définition de « renseignements personnels » (p. ex. les coordonnées professionnelles des fonctionnaires).
[5] Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent alors se demander si les circonstances suivantes existent :
- la personne concernée par les renseignements consent à leur divulgation;
- les renseignements sont accessibles au public;
- la communication des renseignements serait conforme à l’article 8 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
[6] Lorsqu’une ou plusieurs de ces circonstances existent, le paragraphe 19(2) de la Loi sur l’accès à l’information exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[7] Je constate que la plupart des renseignements qu’EDSC a refusé de communiquer en vertu du paragraphe 19(1) concernent des personnes identifiables et ne sont pas visés par l’une des exceptions à la définition de « renseignements personnels » prévues dans la Loi sur la protection des renseignements personnels. Plus précisément, je constate que les renseignements relatifs aux candidats proposés, aux fournisseurs et aux congés satisfont aux critères de l’exception.
[8] En outre, je note qu’EDSC a refusé de communiquer des renseignements concernant la manière dont ses employés accomplissaient leur travail. Je conclus que la décision de ne pas communiquer ces renseignements est conforme aux deux décisions suivantes.
[9] Dans Dagg c. Canada (Ministre des Finances), 1997 CanLII 358 (CSC), [1997] 2 RCS 403, la Cour a déclaré ceci :
[…] les renseignements qui concernent principalement des personnes elles‑mêmes ou la manière dont elles choisissent d’accomplir les tâches qui leur sont confiées sont des « renseignements personnels ». En général, les renseignements concernant le poste, les fonctions ou les attributions d’une personne sont du genre de ceux qu’on trouve dans la description de travail.
[10] Dans Canada (Information Commissioner) v. Canada (Solicitor General), 1988 3 F.C. 551 (Fed. T.D.), au para 557, la Cour a expliqué ceci [traduction tirée de la décision Dagg] :
Rien n’indique qu’on ait eu l’intention de rendre publiques les évaluations qualitatives du rendement d’un employé. En effet, il serait tout à fait injuste que les détails de la prestation de travail de l’employé soient considérés comme des renseignements publics pour la simple raison que la personne est une employée de l’État.
[11] Par conséquent, je conclus que les renseignements non communiqués relatifs à la manière dont les employés d’EDSC effectuent leur travail constituent des renseignements personnels.
[12] Cependant, l’identité de la consultante retenue était divulguée dans les documents, puisque l’information concerne le travail qu’elle a accompli pour EDSC dans le cadre d’un contrat; son nom ne pouvait pas être protégé. Par contre, la totalité de son CV n’était pas communiquée.
[13] Après avoir examiné les renseignements non communiqués dans le CV de la consultante retenue, je constate que certains ne satisfont pas aux critères du paragraphe 19(1). Plus précisément, les renseignements suivants sont visés par les exceptions à la définition de renseignements personnels : l’en-tête du tiers (y compris les coordonnées du tiers accessibles au public), le résumé professionnel (à part les deux premières puces) et la totalité de la section sur l’expérience professionnelle (qui contient des descriptions du travail accompli pour le gouvernement à titre d’employée ou de contractuelle).
[14] Avant de rendre une ordonnance concernant les renseignements en question, j’ai consulté le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, conformément à l’article 36.2 de la Loi sur l’accès à l’information. Celui-ci était d’accord avec mon analyse et a indiqué que le contenu du CV de la consultante décrivant son expérience dans le cadre d’emplois au gouvernement fédéral est visé par les exceptions à la définition de « renseignements personnels » prévues aux alinéas 3j) et 3k) de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Par conséquent, ces renseignements auraient dû être communiqués.
[15] En résumé, je conclus qu’EDSC a démontré que la plupart des renseignements qu’il a refusé de communiquer satisfont aux critères de l’article 19(1), à l’exception des renseignements relatifs au poste, aux fonctions et aux responsabilités de la candidate retenue alors qu’elle était employée ou contractuelle pour une institution fédérale. Je conclus que ces derniers ne sont pas des renseignements personnels, car ils sont visés par les exceptions à la définition de « renseignements personnels » prévues aux alinéas 3j) et 3k) de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[16] Étant donné que les renseignements satisfont aux critères du paragraphe 19(1), EDSC était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 19(2) afin de décider de communiquer ou non les renseignements lorsqu’au moins l’une des circonstances décrites au paragraphe 19(2) existait au moment de la réponse.
[17] En vertu de l’alinéa 19(2)a), EDSC était tenu d’établir si le consentement a été donné en faisant des efforts raisonnables pour demander le consentement des personnes dont les renseignements personnels figurent dans les documents. Le Commissariat à l’information a donc demandé quels efforts raisonnables avaient été faits pour demander le consentement et, sinon, pourquoi EDSC n’a pas estimé raisonnable de le faire. Bien que j’accepte l’explication d’EDSC concernant la raison pour laquelle il n’a pas estimé raisonnable de demander le consentement d’une personne, EDSC n’a pas expliqué pourquoi il n’avait pas fait d’effort pour demander le consentement des autres personnes (candidats proposés, coordonnées des tiers, références des candidats et employés d’EDSC). Par conséquent, à l’exception d’une personne, je dois conclure qu’EDSC n’a pas démontré que les circonstances énoncées à l’alinéa 19(2)a) existaient, ce qui l’a empêché d’exercer son pouvoir discrétionnaire, le cas échéant.
[18] En vertu de l’alinéa 19(2)b), EDSC était tenu d’exercer son pouvoir discrétionnaire si certains des renseignements personnels étaient accessibles au public. Le Commissariat à l’information a demandé à EDSC s’il avait vérifié si les renseignements personnels étaient accessibles au public au moment de traiter la demande. EDSC a démontré, dans sa preuve et dans ses observations, qu’il avait vérifié si les renseignements personnels étaient accessibles au public, et exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’alinéa 19(2)b) pour les communiquer. Je conclus que les circonstances prévues à cet alinéa existaient lorsqu’EDSC a répondu à la demande et qu’il a exercé son pouvoir discrétionnaire pour communiquer les renseignements qu’il savait accessibles au public. Par conséquent, l’exercice du pouvoir discrétionnaire par EDSC était raisonnable.
[19] Je note que, au cours de l’enquête, le Commissariat à l’information a repéré d’autres renseignements personnels accessibles au public qui ne l’étaient pas au moment de répondre à la demande ou qui l’étaient, mais sans que EDSC n’en ait connaissance.Néanmoins, EDSC a confirmé qu’il accepte maintenant de communiquer ces renseignements.
[20] EDSC était également tenu d’exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’alinéa 19(2)c)lorsque la communication serait conforme à l’article 8 de la Loi sur la protection des renseignements personnels. On a demandé à EDSC s’il avait tenu compte du sous-alinéa 8(2)m)(i) de cette loi, qui lui aurait permis de communiquer des renseignements personnels lorsque « des raisons d’intérêt public justifieraient nettement une éventuelle violation de la vie privée ».
[21] Selon les observations d’EDSC, je conclus qu’il a également considéré ces intérêts contradictoires ainsi que des facteurs pertinents lorsqu’il a décidé de ne pas communiquer l’information.Je conclus que les circonstances énoncées à l’alinéa 19(2)c) n’existaient pas lorsqu’EDSC a répondu à la demande d’accès, car le responsable de l’institution n’était pas d’avis que des raisons d’intérêt public justifieraient nettement une éventuelle violation de la vie privée. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner la question du pouvoir discrétionnaire en vertu de l’alinéa 19(2)c).
Alinéa 20(1)c) : pertes ou profits financiers d’un tiers
[22] L’alinéa 20(1)c) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements dont la communication risquerait vraisemblablement d’avoir une incidence financière importante sur un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou un particulier, et non pas le demandeur d’accès) ou de nuire à sa compétitivité.
[23] Pour invoquer cette exception relativement aux pertes ou profits financiers d’un tiers, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- la divulgation des renseignements pourrait causer des pertes ou profits financiers appréciables pour le tiers;
- il y a une attente raisonnable que ce préjudice puisse être causé; l’attente doit être bien au-delà d’une simple possibilité.
[24] Pour invoquer cette exception relativement à la compétitivité, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- la divulgation des renseignements pourrait nuire à la compétitivité du tiers;
- il y a une attente raisonnable que ce préjudice puisse être causé; l’attente doit être bien au-delà d’une simple possibilité.
[25] Lorsque ces critères sont satisfaits et que le tiers auquel les renseignements se rapportent consent à leur divulgation, le paragraphe 20(5) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.
[26] De plus, lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent aussi exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer les renseignements pour des raisons de santé publique ou de sécurité publique, ou pour protéger l’environnement, lorsque les deux circonstances suivantes existent :
- la divulgation des renseignements serait dans l’intérêt public;
- l’intérêt public dans la divulgation est nettement supérieur à toute répercussion financière sur le tiers, à toute atteinte à la sécurité de ses ouvrages, réseaux ou systèmes, à sa compétitivité ou à toute entrave aux négociations contractuelles ou autres qu’il mène.
[27] Toutefois, les paragraphes 20(2) et 20(4) interdisent expressément aux institutions d’invoquer l’alinéa 20(1)c) pour refuser de communiquer des renseignements qui contiennent les résultats d’essais de produits ou d’essais d’environnement effectués par une institution fédérale ou en son nom, sauf si ces essais ont été effectués moyennant paiement pour un particulier ou un organisme autre qu’une institution fédérale.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[28] EDSC a refusé de communiquer les renseignements suivants concernant les tiers :
- Taux horaire
- Noms des candidats proposés pour le poste et détails relatifs à ces derniers
- Nom de l’entreprise et coordonnées pour les questions des soumissionnaires
- Commentaires dans la grille d’évaluation
- Nombres d’heures dans le contrat initial et heures supplémentaires ajoutées
- Jours travaillés par semaine par la ressource retenue
- Valeur maximale des modifications au contrat
- Mention d’un contrat avec un tiers dans des notes de breffage
[29] Les noms des candidats proposés pour le poste et les détails relatifs à ces derniers n’ont pas été communiqués en vertu du paragraphe 19(1). Puis que j’ai accepté l’application par EDSC du paragraphe 19(1) à ces renseignements, il n’est pas nécessaire d’examiner l’application de l’alinéa 20(1)c) à ces mêmes renseignements.
[30] Conformément à l’alinéa 35(2)c), les tiers qui, selon EDSC, étaient concernés par les renseignements non communiqués en vertu de l’alinéa 20(1)c) ont eu l’occasion de présenter des observations. Seulement trois des neuf tiers ont présenté des observations durant l’enquête : LRO Staffing, Altis Professional Recruitment et MaxSys Staffing & Consulting. Ni LRO Staffing ni Altis Professional Recruitment ne se sont opposés à la communication des renseignements en cause. MaxSys Staffing & Consulting s’est opposé à la communication des commentaires dans la grille d’évaluation.
[31] Adirondack Information Management Inc., après avoir reçu l’avis de mon intention d’ordonner la communication des renseignements concernant sa coentreprise (Adirondack Information Management, The AIM Group Inc. JV), a confirmé au nom de celle-ci qu’il ne s’opposait pas à la communication des renseignements en cause.
[32] Aucune observation n’a été reçue des tiers à l’appui de l’application de l’alinéa 20(1)c) aux renseignements suivants :
- Nombres d’heures dans le contrat initial et heures supplémentaires ajoutées
- Jours travaillés par semaine par la ressource retenue
- Valeur maximale des modifications au contrat
- Mention d’un contrat avec un tiers dans des notes de breffage
[33] Ces renseignements semblent se rapporter aux détails du contrat et il est difficile de voir en quoi leur communication pourrait nuire à la compétitivité d’un tiers. Puisque le nombre de semaines visées par le contrat et le nombre d’heures par semaine ont été fournis à tous les soumissionnaires potentiels dans le formulaire de demande de disponibilité pour les services d’aides temporaires, le nombre d’heures présumé inclus dans le contrat initial aurait été accessible à la majorité des soumissionnaires. Je ne suis pas convaincue que la communication aurait pu causer des pertes financières appréciables à un tiers ou nuire à sa compétitivité.
[34] Puisque la commande subséquente a été passée en août 2015 et accordée en septembre 2015, et que la demande d’accès a été faite en mars 2017, EDSC devait démontrer que le préjudice était probable au moment où les renseignements ont été demandés.
[35] Cette exception exige qu’il existe un lien clair et direct entre la communication des renseignements et un risque de préjudice allant bien au-delà de la simple possibilité.[Voir Merck Frosst Canada Ltée c. Canada (Santé), 2012 CSC 3, para 197, 206.] Je conclus que les observations des tiers ne sont pas suffisantes pour satisfaire aux critères de l’exception prévue à l’alinéa 20(1)c). Les observations fournies par EDSC et les tiers ne sont que des hypothèses, contiennent très peu de détails et ne présentent aucun lien entre la communication et une attente raisonnable de préjudice.
[36] EDSC et les tiers consultés ont démontré que le taux horaire satisfait aux critères de l’alinéa 20(1)c). Toutefois, ni EDSC ni les tiers n’ont démontré que les autres renseignements en cause satisfont aux critères de cet alinéa. Aucun élément de preuve n’a été fourni pour démontrer qu’il existe une attente raisonnable qu’un préjudice puisse être causé par la divulgation de ce type de renseignements. Je conclus que les renseignements en cause, à part le taux horaire, ne satisfont pas aux critères de l’exception.
Alinéa 21(1)b) : comptes rendus de consultations ou de délibérations
[37] L’alinéa 21(1)b) permet aux institutions de refuser de communiquer des comptes rendus de consultations ou de délibérations auxquelles ont participé des employés du gouvernement, des ministres ou leur personnel.
[38] Pour que cette exception s’applique, les documents qui contiennent les renseignements doivent avoir été créés moins de vingt ans avant la demande d’accès.
[39] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements sont un compte rendu, c’est-à-dire un rapport ou une description;
- le compte rendu concerne des consultations ou des délibérations;
- au moins un dirigeant, administrateur ou employé de l’institution ou un ministre ou un membre de son personnel a pris part aux consultations ou aux délibérations.
[40] Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.
[41] Toutefois, le paragraphe 21(2) interdit expressément aux institutions d’invoquer l’alinéa 21(1)b) pour refuser de communiquer ce qui suit :
- des documents qui contiennent les motifs ou les comptes rendus de décisions qui touchent les droits d’une personne prises par les institutions dans l’exercice de leurs pouvoirs discrétionnaires ou dans l’exercice de leurs fonctions judiciaires ou quasi judiciaires;
- des rapports établis par des consultants ou des conseillers qui n’étaient pas, au moment où ces rapports ont été établis, des administrateurs, des dirigeants ou des employés d’une institution ou des membres du personnel du ministre.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[42] Dans ses observations, EDSC a démontré que les renseignements non communiqués aux pages 161-162, 173, 184-186, 1364, 1368, 1528, 1541 et 1557 satisfont aux critères de l’exception en vertu de l’alinéa 21(1)b).
[43] EDSC n’a fourni aucune observation démontrant en quoi les renseignements aux pages 179, 1529 et 1549 satisfaisaient aux critères de l’exception.
[44] De plus, je constate que les renseignements aux pages 178 et 184 sont factuels. Par conséquent, ils ne satisfont pas aux critères de l’alinéa 21(1)b).
[45] EDSC n’a pas démontré que les renseignements non communiqués en vertu de l’alinéa 21(1)b) aux pages 178-179, 184, 1529 et 1549 sont un compte rendu concernant des consultations ou des délibérations. Par conséquent, je conclus que les renseignements non communiqués dans ces pages ne satisfont pas aux critères de l’alinéa 21(1)b).
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[46] En vertu de l’alinéa 21(1)b), EDSC était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider s’il communiquait ou non les renseignements aux pages 161-162, 173, 184-186, 1364, 1368, 1528, 1541 et 1557. Pour ce faire, EDSC devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour ou contre la communication.
[47] EDSC a fourni des observations sur les facteurs qu’il avait pris en considération pour exercer son pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les renseignements dans ces pages.
[48] Lorsqu’EDSC a démontré que les renseignements non communiqués satisfaisaient aux critères de l’alinéa 21(1)b), je conclus qu’il a pris en considération tous les facteurs pertinents lorsqu’il a décidé de ne pas communiquer l’information. Par conséquent, l’exercice de son pouvoir discrétionnaire concernant ces renseignements était raisonnable.
Article 23 : secret professionnel de l’avocat
[49] L’article 23 permet aux institutions de refuser de communiquer des renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat ou du notaire lorsque l’information concerne des avis juridiques donnés à un client. L’article 23 permet aussi aux institutions de refuser de communiquer des renseignements protégés par le privilège relatif au litige lorsque l’information a été préparée ou recueillie aux fins d’un litige.
[50] Pour invoquer cette exception relativement à un avis juridique, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- l’information consiste en une communication entre un avocat ou un notaire et son client;
- cette communication concerne directement les consultations ou les avis juridiques, y compris tous les renseignements nécessaires échangés en vue de l’obtention d’avis juridiques;
- les communications et les conseils sont destinés à être confidentiels.
[51] Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions (à qui appartient le privilège) doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[52] Selon les observations reçues d’EDSC, je conclus que les renseignements satisfont aux critères de l’article 23. Les documents concernent des communications entre un avocat et son client échangées en vue de l’obtention d’avis juridiques qui sont destinées à être confidentielles.
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[53] Étant donné que les renseignements satisfont aux critères de l’article 23, EDSC devait exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non l’information. Pour ce faire, EDSC devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour ou contre la communication.
[54] EDSC a indiqué avoir consulté ses services juridiques au sujet de l’application de l’article 23, et avoir pris en considération leurs conseils ainsi que d’autres facteurs pertinents.
[55] Je suis d’avis qu’EDSC a pris en considération tous les facteurs pertinents lorsqu’il a décidé de ne pas communiquer les renseignements en vertu de l’article 23. Par conséquent, l’exercice du pouvoir discrétionnaire par EDSC était raisonnable.
Paragraphe 24(1) : communication restreinte par une autre loi
[56] Le paragraphe 24(1) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements dont la communication est restreinte par une disposition de l’annexe II de la Loi sur l’accès à l’information.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[57] EDSC s’est appuyé sur l’article 241 de la Loi de l’impôt sur le revenu, une disposition énumérée à l’annexe II, pour refuser de communiquer les numéros d’entreprise de fournisseurs.
[58] L’article 241 de la Loi de l’impôt sur le revenu prévoit une interdiction générale de communiquer des renseignements confidentiels, sous réserve de certaines exceptions limitées.
[59] EDSC a indiqué que les numéros d’entreprise ne sont pas accessibles au public et qu’il a suivi l’orientation qu’il a obtenue de l’Agence du revenu du Canada concernant l’applicabilité du paragraphe 24(1) à ce type de renseignement.
[60] Le paragraphe 241(10) de la Loi de l’impôt sur le revenu définit un « renseignement confidentiel » comme étant un renseignement de toute nature et sous toute forme concernant un ou plusieurs contribuables identifiables et qui, selon le cas, est obtenu par le ministre du Revenu national ou en son nom pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu ou est tiré d’un tel renseignement.
[61] EDSC a démontré que l’article 241 de la Loi de l’impôt sur le revenu restreint la communication des renseignements en cause. Par conséquent, je conclus que les renseignements satisfont aux critères du paragraphe 24(1).
Résultats
[62] La plainte est fondée.
Ordonnance
Conformément au paragraphe 36.1(1) de la Loi, j’ordonne à la ministre de l’Emploi et du Développement social ce qui suit :
- Communiquer tous les renseignements non communiqués en vertu du paragraphe 19(1) se rapportant au poste, aux fonctions et aux responsabilités de la consultante retenue alors qu’elle était employée ou contractuelle pour une institution fédérale, à savoir : l’en-tête du tiers, le résumé professionnel et la totalité de la section sur l’expérience professionnelle dans le CV non communiqué;
- Établir si la circonstance décrite à l’alinéa 19(2)a) existe en faisant des efforts raisonnables pour demander le consentement de communiquer les renseignements personnels aux personnes à qui ils se rapportent (à l’exception des renseignements pour lesquels j’ai déjà accepté l’explication d’EDSC pour ne pas avoir demandé le consentement d’une personne en particulier) et, pour les personnes qui consentent, exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements personnels;
- Communiquer tous les renseignements non communiqués en vertu de l’alinéa 20(1)c), à l’exception du taux horaire ainsi que des noms des candidats proposés pour le poste et détails relatifs à ces derniers qui n’ont pas été communiqués, également en vertu du paragraphe 19(1) (en attendant le résultat de la mise en œuvre de l’ordonnance no 2 ci-dessus);
- Communiquer tous les renseignements non communiqués en vertu de l’alinéa 21(1)b) aux pages 178-179, 1529 et 1549 ainsi que les renseignements factuels non communiqués en vertu de l’alinéa 21(1)b) à la page 184.
Le 2 juin 2022, j’ai transmis à la ministre de l’Emploi et du Développement social mon rapport dans lequel je présentais mon ordonnance.
Le 30 juin 2022, le directeur, Accès à l’information et protection des renseignements personnels, m’a avisée qu’EDSC donnerait suite à mon ordonnance.
J’ai aussi fait parvenir le présent compte rendu à Altis Professional Recruitment, à LRO Staffing, à MaxSys Staffing & Consulting, à Adirondack Information Management, The AIM Group Inc. JV et au commissaire à la protection de la vie privée.
L’article 41 de la Loi sur l’accès à l’information confère à tous les destinataires du présent compte rendu le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. La partie plaignante et l’institution doivent exercer leur recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu. Si celles-ci n’exercent pas de recours, les tiers et le commissaire à la protection de la vie privée peuvent exercer un recours en révision dans les 10 jours ouvrables suivants. La personne qui exerce un recours en révision doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43. Si personne n’exerce de recours en révision dans ces délais, l’ordonnance prend effet le 46e jour ouvrable suivant la date du présentcompte rendu.