Instituts de recherche en santé du Canada (Re), 2023 CI 22
Date : 2023-08-01
Numéro de dossier du Commissariat : 5822-00322
Numéro de dossier de l’institution : A-2021-0022
Sommaire
La partie plaignante allègue que les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu de l’alinéa 18a) (secrets industriels du gouvernement, renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques du gouvernement), du paragraphe 19(1) (renseignements personnels) et de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers) de la Loi sur l’accès à l’information. La demande d’accès visait des documents concernant le rôle d’une personne désignée au sein du comité consultatif de Pfizer sur la maladie de Lyme et son projet de recherche sur la maladie de Lyme. La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.
Ni l’institution ni le tiers n’ont pu démontrer que les renseignements visés par la plainte satisfaisaient à tous les critères de l’exception prévue à l’alinéa 20(1)b); notamment, les renseignements ne sont pas de nature financière, commerciale, scientifique ou technique.
La plainte est fondée.
La Commissaire à l’information a ordonné aux IRSC de communiquer les renseignements en question.
Les IRSC ont avisé la Commissaire qu’ils donneraient suite à l’ordonnance.
Plainte
[1] La partie plaignante allègue que les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu de l’alinéa 18a) (secrets industriels du gouvernement, renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques du gouvernement), du paragraphe 19(1) (renseignements personnels) et de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers) de la Loi sur l’accès à l’information. La demande d’accès visait des documents concernant le rôle d’une personne désignée au sein du comité consultatif de Pfizer sur la maladie de Lyme et son projet de recherche sur la maladie de Lyme.
[2] Au cours de l’enquête, la partie plaignante a réduit la portée de sa demande pour se concentrer sur trois sections précises des documents non communiqués en vertu de l’alinéa 20(1)b), et a décidé qu’il n’était plus nécessaire pour le Commissariat à l’information de mener une enquête sur les exceptions visant les autres renseignements. Par conséquent, les renseignements qui demeurent visés sont les suivants :
- Pages 173-174 : à la section 3.3.3 de la proposition de recherche, une description d’un programme de subvention de démarrage;
- Page 183 : des renseignements relatifs à un site sentinelle à Lunenburg, en Nouvelle-Écosse;
- Page 189 : la branche « D » d’un graphique illustrant la structure de gouvernance proposée pour le réseau de recherche canadien sur la maladie de Lyme (Canadian Lyme Disease Research Network ou CLyDRN).
Enquête
[3] Lorsqu’une institution refuse de communiquer les renseignements d’un ou des tiers, il incombe à ces tiers et/ou à l’institution de démontrer que ce refus est justifié.
[4] Le Commissariat a demandé des observations au tiers, le chercheur principal désigné (CPD), par l’entremise de l’Université Queen’s, qui a déclaré ne pas avoir de préoccupations quant à la divulgation des renseignements en cause. Le CPD a indiqué qu’il s’en remettrait au jugement des IRSC en ce qui concerne la divulgation des renseignements.
[5] Le 13 février 2023, le Commissariat a demandé des observations aux IRSC en vertu de l’alinéa 35(2)b) de la Loi, concernant l’application de l’alinéa 20(1)b). Le 15 mars 2023, les IRSC ont répondu qu’ils avaient examiné les parties des documents en cause et ont concédé que le critère pour que l’alinéa 20(1)b) s’applique n’était pas satisfait. Les IRSC ont indiqué qu’ils se préparaient à communiquer les renseignements en cause aux pages 173, 174, 183 et 189, et n’ont présenté aucune observation à l’appui des exceptions dont ils maintenaient l’application aux renseignements en cause.
[6] Conformément à l’article 36.3, j’ai avisé le CPD de mon intention d’ordonner aux IRSC de communiquer les renseignements en cause dans leur totalité et je lui ai donné une dernière occasion de présenter des observations. Il n’a pas répondu.
Alinéa 20(1)b) : renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers
[7] L’alinéa 20(1)b) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels fournis à une institution fédérale par un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou une personne, et non pas le demandeur d’accès).
[8] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements sont financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques;
- les renseignements sont de nature confidentielle;
- le tiers a fourni les renseignements à une institution fédérale;
- le tiers a toujours traité les renseignements comme étant confidentiels.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[9] L’alinéa 20(1)b) exige que les parties qui s’opposent à la communication présentent des observations démontrant que les quatre critères de l’exception ont été satisfaits à l’égard des renseignements non communiqués.
[10] En ce qui concerne le premier critère, à savoir que les renseignements doivent être « financiers », « commerciaux », « scientifiques » ou « techniques », la Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Merck Frosst Canada Ltée c. Canada (Santé), 2012 CSC 3, au para 139, a déclaré qu’il « convient de donner aux termes “financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques” leur sens lexicographique ordinaire. »
[11] Je suis d’avis qu’aucun des renseignements en cause n’est de nature financière, commerciale, scientifique ou technique, au sens courant de ces termes, et aucune observation n’a été présentée concernant ce critère. Les renseignements non communiqués décrivent des aspects d’un réseau de recherche proposé, le CLyDRN. Bien que le réseau vise à faciliter la recherche scientifique relative à la maladie de Lyme, les renseignements que renferme la proposition ne sont pas, en soi, de nature scientifique.
[12] Le Nouveau Petit Robert définit le terme « commercial » comme suit : « qui a rapport au commerce », « conçu, exécuté dans une intention lucrative ».
[13] Le CLyDRN est un réseau de recherche national qui appuie et coordonne des activités de recherche multidisciplinaires relatives à la maladie de Lyme au Canada. Le réseau est financé par les IRSC et des dons versés par l’entremise du fonds fiduciaire pour la recherche sur la maladie de Lyme (Lyme Disease Research Trust Fund). Je suis d’avis que le CLyDRN, ainsi que les renseignements relatifs à son programme de subvention de démarrage, son site sentinelle ou sa structure de gouvernance, n’ont aucun aspect commercial. Par conséquent, je ne suis pas d’avis que le premier critère a été satisfait. Il n’est donc pas nécessaire que j’évalue si les renseignements satisfont aux autres critères de l’alinéa 20(1)b).
[14] Je conclus qu’aucun des renseignements ne satisfait aux critères de l’exception prévue à l’alinéa 20(1)b).
Résultat
[15] La plainte est fondée.
Ordonnance
Conformément au paragraphe 36.1(1) de la Loi, j’ordonne au président des Instituts de recherche en santé du Canada de communiquer les renseignements suivants :
- Pages 173-174 : à la section 3.3.3 de la proposition de recherche, une description d’un programme de subvention de démarrage;
- Page 183 : des renseignements relatifs à un site sentinelle à Lunenburg, en Nouvelle-Écosse;
- Page 189 : la branche « D » d’un graphique illustrant la structure de gouvernance proposée pour le réseau de recherche canadien sur la maladie de Lyme (Canadian Lyme Disease Research Network ou CLyDRN).
Le 29 mai 2023, j’ai transmis au président des Instituts de recherche en santé du Canada mon rapport dans lequel je présentais l’ordonnance.
Le 28 juin 2023, les IRSC ont confirmé qu’ils donneraient suite à mon ordonnance.
J’ai aussi fait parvenir le présent compte rendu au chercheur principal désigné.
Lorsque la plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a), b), c), d), d.1) ou e) de la Loi, la partie plaignante et l’institution ont le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. Celles-ci doivent exercer leur recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu. Si celles-ci n’exercent pas de recours, les tiers peuvent exercer un recours en révision dans les 10 jours ouvrables suivants. La personne qui exerce un recours en révision doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43. Si personne n’exerce de recours en révision dans ces délais, l’ordonnance prend effet le 46e jour ouvrable suivant la date du présent compte rendu.