Pêches et Océans Canada (Re), 2023 CI 30
Date : 2023-07-04
Numéro de dossier du Commissariat : 5821-05513
Numéro de dossier de l’institution: A-2021-00647 / LV
Sommaire
La partie plaignante allègue que Pêches et Océans Canada (le MPO) a erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu du paragraphe 19(1) (renseignements personnels) et de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers) de la Loi sur l’accès à l’information. La demande d’accès visait des certificats médicaux fournis par Marineland pour l’exportation de cinq bélugas. La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.
L’application du paragraphe 19(1) pour refuser de communiquer les documents n’est plus visée par la plainte.
Le MPO et le tiers n’ont pas démontré que les renseignements satisfaisaient à tous les critères de l’alinéa 20(1)b), notamment qu’ils étaient confidentiels ou que le tiers les avait toujours traités comme étant confidentiels.
La Commissaire à l’information a recommandé au MPO de communiquer les documents dans leur intégralité, sauf les renseignements n’ayant pas été communiqués en vertu du paragraphe 19(1). Le MPO a avisé la Commissaire qu’elle donnerait suite à l’ordonnance.
La plainte est fondée.
Plainte
[1] La partie plaignante allègue que Pêches et Océans Canada (le MPO) a erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu du paragraphe 19(1) (renseignements personnels) et de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers) de la Loi sur l’accès à l’information. La demande d’accès visait des certificats médicaux fournis à l’appui de demandes de licences d’exportation aux termes de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction et/ou de la Loi sur les pêches présentées par Marineland of Canada Inc. (Marineland) pour l’exportation de bélugas au Mystic Aquarium, aux États-Unis. La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi sur l’accès à l’information.
[2] Au cours de l’enquête, la partie plaignante a décidé qu’il n’était plus nécessaire pour le Commissariat à l’information de mener une enquête sur l’application du paragraphe 19(1) aux renseignements en cause.
Enquête
[3] Lorsqu’une institution refuse de communiquer les renseignements d’un ou des tiers, il incombe à ces tiers et/ou à l’institution de démontrer que ce refus est justifié.
Alinéa 20(1)b) : renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers
[4] L’alinéa 20(1)b) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels fournis à une institution fédérale par un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou une personne, et non pas le demandeur d’accès).
Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements sont financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques;
- les renseignements sont de nature confidentielle;
- le tiers a fourni les renseignements à une institution fédérale;
- le tiers a toujours traité les renseignements comme étant confidentiels.
[5] Lorsque ces critères sont satisfaits et que le tiers auquel les renseignements se rapportent consent à leur divulgation, le paragraphe 20(5) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.
[6] De plus, lorsque ces critères sont satisfaits, le paragraphe 20(6) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer les renseignements pour des raisons de santé publique ou de sécurité publique, ou pour protéger l’environnement, lorsque les deux circonstances suivantes existent :
- la divulgation des renseignements serait dans l’intérêt public;
- l’intérêt public dans la divulgation est nettement supérieur à toute répercussion financière sur le tiers, à toute atteinte à la sécurité de ses ouvrages, réseaux ou systèmes, à sa compétitivité ou à toute entrave aux négociations contractuelles ou autres qu’il mène.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[7] Le Commissariat a demandé des observations à Marineland et au MPO en vertu de l’article 35 de la Loi sur l’accès à l’information. Les deux parties maintiennent que l’alinéa 20(1)b) a été appliqué correctement, mais n’ont pas fourni d’observations détaillées me convainquant que les renseignements satisfont aux critères de l’exception.
[8] En réponse à l’avis du Commissariat en vertu du paragraphe 36.3(1) de la Loi sur l’accès à l’information, Marineland a confirmé qu’il n’avait pas d’autres observations à formuler, mais a continué à s’opposer à la communication des renseignements en cause.
[9] Les documents en cause sont des certificats médicaux produits par le Animal Medical Centre de Niagara Falls, en Ontario, pour cinq bélugas. Les certificats faisaient partie d’une condition de la vente des bélugas par Marineland, à Niagara Falls, en Ontario, au Mystic Aquarium, aux États-Unis.
[10] Des parties des certificats médicaux ont été communiquées, dont les noms des bélugas, leurs dates de naissance ainsi que les adresses du propriétaire et de l’acheteur.
[11] En ce qui concerne le premier critère de l’exception, je conviens que les certificats médicaux attestent de la viabilité des produits (descriptions de produit), ce qui fait partie d’une condition de la vente, et qu’il s’agit par conséquent de renseignements commerciaux.
[12] Pour ce qui est du deuxième critère de l’alinéa 20(1)b), afin que les renseignements soient considérés comme confidentiels, chacune des conditions suivantes doit être satisfaite :
- les renseignements ne peuvent être obtenus de sources auxquelles le public a autrement accès;
- les renseignements doivent avoir été transmis confidentiellement avec l’assurance raisonnable qu’ils ne seront pas divulgués;
- les renseignements doivent être communiqués, que ce soit parce que la loi l’exige ou autrement, dans le cadre d’une relation de confiance entre l’administration et la personne qui les fournit ou dans le cadre d’une relation qui n’est pas contraire à l’intérêt public, et que la communication des renseignements confidentiels doit favoriser cette relation dans l’intérêt public. [Voir : Air Atonabee Ltd. (f.a.s. City Express) c. Canada (Ministre des Transports), [1989] A.C.F. no 453.]
[13] Je conviens que certaines parties des renseignements non communiqués ne pouvaient pas être obtenues de sources auxquelles le public avait autrement accès au moment où le MPO a répondu à la demande d’accès. Cependant, les caractéristiques permettant d’identifier les bélugas, à savoir les descriptions des marques ou traits physiques propres à chacun d’entre eux, étaient accessibles au public depuis des années, puisque les bélugas en question étaient exposés à Marineland.
[14] Cela dit, aucune observation n’a été reçue pour démontrer que les deuxième et troisième critères de confidentialité s’appliquent aux renseignements en cause. Pour ce qui est de l’attente de confidentialité, la Cour fédérale a conclu ceci : « Une partie qui cherche à obtenir une approbation du gouvernement, tout comme celles qui cherchent à obtenir des fonds ou des contrats du gouvernement, ne peut s’attendre à jouir du même degré de confidentialité qu’une partie qui aide le gouvernement. » [AstraZeneca Canada Inc. c. Canada (Ministre de la santé), 2005 CF 189, para 76; confirmé dans 2006 CAF 241] Aucune observation à cet effet n’a été présentée dans le cadre de l’enquête.
[15] En ce qui concerne le troisième critère de l’exception, le Commissariat convient que les documents en question ont été fournis au MPO par le tiers.
[16] Pour ce qui est du dernier critère, le Commissariat n’a reçu aucune preuve lui permettant de conclure que Marineland a toujours traité les renseignements comme étant confidentiels.
[17] Je conclus que l’alinéa 20(1)b) ne s’applique pas aux renseignements en cause.
Résultat
[18] La plainte est fondée.
Ordonnance
Conformément au paragraphe 36.1(1) de la Loi sur l’accès à l’information, j’ordonne à la ministre des Pêches et des Océans de communiquer les documents dans leur intégralité, sauf les renseignements actuellement non communiqués en vertu du paragraphe 19(1), car ils ne sont pas visés par l’enquête.
Le 18 avril 2023, j’ai transmis à la ministre des Pêches et des Océans mon rapport dans lequel je présentais l’ordonnance que j’avais l’intention de rendre.
Le 18 mai 2023, le directeur, Accès à l’information et protection des renseignements personnels, m’a avisée que l’institution donnerait suite à mon ordonnance.
J’ai aussi fait parvenir le présent compte rendu à Marineland.
Lorsque la plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a), b), c), d), d.1) ou e) de la Loi sur l’accès à l’information, la partie plaignante et l’institution ont le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. Celles-ci doivent exercer leur recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu. Si elles n’exercent pas de recours, les tiers peuvent exercer un recours en révision dans les 10 jours ouvrables suivants. La personne qui exerce un recours en révision doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43. Si personne n’exerce de recours en révision dans ces délais, l’ordonnance prend effet le 46e jour ouvrable suivant la date du présent compte rendu.