Santé Canada (Re), 2022 CI 52
Date : 2022-12-15
Numéro de dossier du Commissariat : 5821-05041
Numéro de dossier de l’institution : A-2021-000118
Sommaire
La partie plaignante allègue que Santé Canada a erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers) et de l’alinéa 20(1)c) (pertes ou profits financiers d’un tiers) de la Loi sur l’accès à l’information, en réponse à une demande d’accès visant deux versions d’une présentation non clinique du vaccin SARS CoV-2 rS de Novavax. La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.
L’alinéa 20(1)b) a été invoqué pour refuser de communiquer deux versions d’une présentation non clinique du vaccin pour la COVID-19 de Novavax, qui a été fournie à Santé Canada en vue d’obtenir une autorisation de mise sur le marché au Canada.
Le Commissariat à l’information est d’avis que les renseignements sont visés par l’exception, car il s’agit de renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers. Le Commissariat conclut également que les circonstances décrites aux paragraphes 20(5) et 20(6), qui feraient en sorte que Santé Canada serait tenu d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer les renseignements ou non, n’existaient pas lorsqu’il a répondu à la demande d’accès.
La plainte est non fondée.
Plainte
[1] La partie plaignante allègue que Santé Canada a erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers) et de l’alinéa 20(1)c) (pertes ou profits financiers d’un tiers) de la Loi sur l’accès à l’information,en réponse à une demande d’accès visait deux versions d’une présentation non clinique du vaccin SARS CoV-2 rS de Novavax. La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.
Enquête
[2] Lorsqu’une institution refuse de communiquer les renseignements d’un ou des tiers, il incombe à ces tiers et/ou à l’institution de démontrer que ce refus est justifié.
[3] Au cours de l’enquête, le Commissariat à l’information a demandé à Novavax de présenter des observations, conformément à l’alinéa 35(2)c) de la Loi. Novavax soutenait que la totalité des renseignements en cause sont visés par les exceptions prévues aux alinéas 20(1)b) et c) de la Loi et a présenté des observations détaillées pour appuyer cette position.
Alinéa 20(1)b) : renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers
[4] L’alinéa 20(1)b) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels fournis à une institution fédérale par un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou une personne, et non pas le demandeur d’accès).
[5] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements sont financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques;
- les renseignements sont de nature confidentielle;
- le tiers a fourni les renseignements à une institution fédérale;
- le tiers a toujours traité les renseignements comme étant confidentiels.
[6] Lorsque ces critères sont satisfaits et que le tiers auquel les renseignements se rapportent consent à leur divulgation, le paragraphe 20(5) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.
[7] De plus, lorsque ces critères sont satisfaits, le paragraphe 20(6) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer les renseignements pour des raisons de santé publique ou de sécurité publique, ou pour protéger l’environnement, lorsque les deux circonstances suivantes existent :
- la divulgation des renseignements serait dans l’intérêt public;
- l’intérêt public dans la divulgation est nettement supérieur à toute répercussion financière sur le tiers, à toute atteinte à la sécurité de ses ouvrages, réseaux ou systèmes, à sa compétitivité ou à toute entrave aux négociations contractuelles ou autres qu’il mène.
[8] Toutefois, les paragraphes 20(2) et 20(4) interdisent expressément aux institutions d’invoquer l’alinéa 20(1)b) pour refuser de communiquer des renseignements qui contiennent les résultats d’essais de produits ou d’essais d’environnement effectués par une institution fédérale ou en son nom, sauf si ces essais ont été effectués moyennant paiement pour un particulier ou un organisme autre qu’une institution fédérale.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[9] L’alinéa 20(1)b) a été invoqué pour refuser de communiquer deux versions d’une présentation non clinique du vaccin pour la COVID-19 de Novavax, qui a été fournie à Santé Canada en vue d’obtenir une autorisation de mise sur le marché au Canada.
[10] Concernant le premier critère, dans la décision Merck Frosst Canada Ltée c. Canada (Santé), 2012 CSC 3, la Cour suprême du Canada a déclaré qu’il « convient de donner aux termes “financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques” leur sens lexicographique ordinaire ». Le Commissariat reconnaît que les renseignements en cause constituent des renseignements scientifiques ou techniques.
[11] Concernant le deuxième critère, afin que l’alinéa 20(1)b) s’applique, les renseignements doivent être confidentiels. Dans la décision Air Atonabee Limited c. Canada (Ministre des Transports) (1989), 27 F.T.R. 194, la Cour fédérale a établi trois sous-critères qui doivent être satisfaits pour que les renseignements soient considérés comme confidentiels :
- les renseignements ne doivent pas être disponibles auprès de sources autrement accessibles au public;
- les renseignements doivent avoir été transmis confidentiellement avec l’assurance raisonnable qu’ils ne seront pas divulgués;
- la relation entre le gouvernement et le tiers n’est pas contraire à l’intérêt public, et l’échange confidentiel des renseignements doit favoriser cette relation dans l’intérêt du public.
[12] Les renseignements en question n’étaient pas accessibles au public lorsque Santé Canada a répondu à la demande d’accès, mais certains articles citant des renseignements figurant dans la présentation non clinique de Novavax semblent avoir été publiés depuis. Tel que mentionné dans un document d’orientation de la Commissaire à l’information, lorsqu’il enquête sur une plainte déposée par quelqu’un à qui on a refusé l’accès à un document en vertu de la Loi, le Commissariat examine la décision de l’institution d’appliquer des exceptions pour prélever de l’information au moment où elle l’a prise. [Changement de circonstances, y compris le temps écoulé (oic-ci.gc.ca)]
[13] De plus, Novavax affirme que les documents soumis dans le cadre d’une présentation de nouveau médicament sont considérés comme de l’information commerciale exclusive et confidentielle, particulièrement lorsque le médicament n’a pas encore été autorisé. Compte tenu de ce qui précède, le Commissariat reconnaît que les renseignements, au moment où la demande a été traitée, étaient dans l’attente d’obtenir l’autorisation d’être utilisés au Canada et, par conséquent, qu’ils ont été transmis confidentiellement à Santé Canada avec l’assurance raisonnable qu’ils ne seraient pas divulgués.
[14] Pour ce qui est du troisième critère de confidentialité, le Commissariat reconnaît que préserver la confidentialité des renseignements favoriserait la relation entre Santé Canada et Novavax dans l’intérêt du public.
[15] Concernant le troisième critère de l’alinéa 20(1)b), le Commissariat reconnaît que les documents en question ont été fournis à Santé Canada par Novavax.
[16] Pour ce qui est du dernier critère, compte tenu de l’objectif de la présentation des documents à Santé Canada et des circonstances dans lesquelles ils ont été compilés et communiqués, le Commissariat reconnaît que les renseignements en cause ont toujours été traités comme étant confidentiels par Novavax et qu’ils satisfont donc à ce critère.
[17] Compte tenu de ce qui précède, le Commissariat reconnaît que, au moment où la demande a été traitée, les renseignements en cause étaient visés par l’exception prévue à l’alinéa 20(1)b).
[18] Puisque le Commissariat est d’avis que l’alinéa 20(1)b) s’applique, il n’est pas nécessaire d’examiner l’application de l’alinéa 20(1)c) pour refuser de communiquer les mêmes renseignements.
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[19] Étant donné que les renseignements satisfont aux critères de l’alinéa 20(1)b), Santé Canada était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire afin de décider de communiquer ou non les renseignements lorsque le tiers qu’il concerne consent à la communication, suivant le paragraphe 20(5).
[20] De plus, Santé Canada était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire afin de décider de communiquer ou non les renseignements pour des raisons de santé publique ou de sécurité publique, ou pour protéger l’environnement, lorsque les deux circonstances décrites au paragraphe 20(6) existaient au moment où il a répondu à la demande d’accès.
[21] Le Commissariat conclut que les circonstances décrites aux paragraphes 20(5) et 20(6) n’existaient pas lorsque Santé Canada a répondu à la demande d’accès. Novavax n’a pas consenti à la communication des renseignements en cause. De plus, le vaccin de Novavax n’avait pas encore reçu l’autorisation d’être utilisé au Canada; par conséquent, l’intérêt public dans la divulgation des renseignements n’était pas nettement supérieur à toute répercussion financière sur Novavax, à toute atteinte à la sécurité de ses ouvrages, réseaux ou systèmes, à sa compétitivité ou à toute entrave aux négociations contractuelles ou autres qu’il mène.
[22] Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner la question du pouvoir discrétionnaire.
Résultat
[23] La plainte est non fondée.
Lorsque la plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a), b), c), d), d.1) ou e) de la Loi, la partie plaignante a le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. La partie plaignante doit exercer son recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu. Si elles n’exercent pas de recours, les tiers peuvent exercer un recours en révision dans les 10 jours ouvrables suivants. La personne qui exerce un recours en révision doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43.