Société Radio-Canada (Re), 2022 CI 34
Date : 2022-07-13
Numéro de dossier du Commissariat : 5820-03525
Numéro de dossier de l’institution : A-2020-00103 / JRC
Sommaire
La partie plaignante allègue que la Société Radio-Canada (SRC) a erronément refusé de communiquer de l’information en vertu de l’alinéa 18 b) (compétitivité ou négociations des institutions fédérales) et du paragraphe 19(1) (renseignements personnels) de la Loi sur l’accès à l’information, en réponse à une demande d’accès aux documents portant sur la rémunération totale des 250 employés syndiqués les mieux rémunérés des Services français de la SRC pour deux années financières.
La SRC a invoqué l’alinéa 18b) pour refuser de communiquer, pour chaque année financière, environ 25 salaires les plus élevés parmi les 250 salaires individuels exacts demandés.
L’enquête a révélé qu’il y a une attente raisonnable que la divulgation des renseignements non communiqués en vertu de l’alinéa 18b) nuise à la compétitivité de la SRC. De plus, la Commissaire à l’information est incapable de conclure que la SRC n’a pas pris en considération tous les facteurs pertinents de ne pas communiquer les renseignements. Par conséquent, le pouvoir discrétionnaire exercé par la SRC était raisonnable.
La plainte est non fondée.
Plainte
[1] La partie plaignante allègue que la Société Radio-Canada (SRC) a erronément refusé de communiquer de l’information en vertu de l’alinéa 18b) (compétitivité ou négociations des institutions fédérales) et du paragraphe 19(1) (renseignements personnels) en réponse à une demande d’accès aux documents portant sur la rémunération totale des 250 employés syndiqués les mieux rémunérés des Services français de la SRC pour deux années financières.
Enquête
[2] Lorsqu’une institution refuse de communiquer des renseignements en vertu d’une exception, il lui incombe de démontrer que ce refus est justifié.
Alinéa 18b) : compétitivité des institutions fédérales
[3] L’alinéa 18b) permet aux institutions de refuser de communiquer des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de nuire à la compétitivité ou d’entraver des négociations contractuelles ou autres d’une institution fédérale.
[4] Pour invoquer cette exception relativement à la compétitivité, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- la divulgation de ces renseignements pourrait nuire à la compétitivité d’une institution fédérale;
- il y a une attente raisonnable que ce préjudice puisse être causé; l’attente doit être bien au-delà d’une simple possibilité.
[5] Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[6] La SRC a invoqué l’alinéa 18b) pour refuser de communiquer, pour chaque année fiscale, environ 25 des 250 salaires individuels exacts demandés.
[7] La SRC a expliqué que le domaine de la diffusion francophone au Canada est extrêmement restreint et compétitif. Les salaires individuels exacts et récents des employés aux rémunérations les plus élevées, au-delà de 150 000$, sont des renseignements importants pour maintenir sa compétitivité.
[8] L’enquête a révélé qu’il y a une attente raisonnable que la divulgation des renseignements non communiqués en vertu de l’alinéa 18b) nuise à la compétitivité de la SRC. En effet, le faible nombre de salaires individuels exacts par tranche de 10 000$ au-delà de 150 000$ permet de les associer facilement à des types de postes. Cette information pourrait être utilisée dans le cadre des négociations salariales, et avoir un impact financier sur la SRC et sur la rétention de ses employés. La divulgation des renseignements nuirait à la compétitivité de la SRC bien au-delà de la simple spéculation.
[9] La SRC a précisé qu’elle accepterait de divulguer des informations plus générales, telles que le nombre d’employés et le salaire moyen par tranches salariales dans le cadre d’une demande d’accès qui ne vise pas spécifiquement la rémunération exacte individuelle des employés, comme c’est le cas en l’espèce.
[10] Dans ce cas-ci précisément, selon l’information au dossier et après considération des représentations de la SRC, je suis d’avis que cette dernière a bien appliqué les critères de l’alinéa 18b) aux renseignements non communiqués.
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[11] Étant donné que les renseignements satisfont aux critères de l’alinéa 18b), la SRC devait exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non l’information. Pour ce faire, elle devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour et contre la communication.
[12] La décision prise par une institution de ne pas communiquer l’information doit être transparente, intelligible et justifiée. L’explication de l’institution est suffisante lorsque cette dernière précise comment la décision a été prise et que les documents relatifs au processus décisionnel permettent de comprendre pourquoi l’institution a procédé comme elle l’a fait.
[13] L’enquête a révélé que la SRC a pondéré son mandat et la nécessité de bien gérer ses ressources dans un marché très compétitif. Elle a également pris en considération le fait qu’il s’agit ici de rémunération individuelle totale exacte d’employés dans un service spécifique et que ces informations sont récentes. Elle en a conclu que les facteurs contre la divulgation l’emportaient sur l’intérêt public pour la divulgation.
[14] Dans ces circonstances, je suis incapable de conclure que la SRC n’a pas pris en considération tous les facteurs pertinents de ne pas communiquer les renseignements. Par conséquent, le pouvoir discrétionnaire exercé par la SRC était raisonnable.
[15] Le paragraphe 19(1) de la Loi a été invoqué et appliqué simultanément à l’information. Puisque je suis satisfaite que l’alinéa 18 b) s’applique, il n’est pas nécessaire de déterminer si le refus de communiquer la même information est justifié en vertu du paragraphe 19(1).
Résultat
[16] La plainte est non fondée.
L’article 41 de la Loi confère à la partie plaignante qui reçoit le présent compte rendu le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. La partie plaignante doit exercer ce recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu et doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43.