Questions et réponses
Accès aux documents gouvernementaux
Lorsqu’il est question d’avoir accès à des documents des institutions fédérales, en quoi le privilège parlementaire diffère-t-il de la Loi sur l’accès à l’information?
- Le processus parlementaire dans son ensemble de même que toutes les discussions qui ont lieu au Parlement concernant des demandes de renseignements auprès du gouvernement font partie d’un processus indépendant et distinct de celui que nous utilisons dans le cadre de l’accès à l’information.
- Je comprends que la Chambre des communes a le droit d’ordonner et d’imposer la production de documents.
- En tant que personne présente au Canada, vous avez le droit de faire une demande d’accès. Si la réponse reçue ne vous satisfait pas, vous avez le droit de déposer une plainte auprès du Commissariat à l’information.
- Je ne peux commenter une demande d’accès précise sans avoir suivi la procédure prévue par la Loi, qui consiste à mener une enquête juste et approfondie, examiner tous les documents, recueillir toutes les observations des parties et formuler des recommandations ou rendre des ordonnances en fonction de mes conclusions.
Un système de déclassification permettrait-il aux parlementaires d’avoir accès à des documents relatifs à la sécurité nationale?
- Un système de déclassification améliorerait l’accès aux documents historiques et aux documents relatifs à la sécurité nationale en les rendant accessibles sans qu’il soit nécessaire de recourir à un système d’accès déjà surchargé.
- Les documents doivent être facilement accessibles aux historiens, aux bibliothécaires, aux archivistes et aux autres personnes qui s’intéressent à l’histoire canadienne.
- Une classification « Secret » ou « Très secret » ne signifie pas que les exceptions prévues par la Loi sur l’accès à l’information doivent s’appliquer. Ces classifications ne doivent pas automatiquement entraîner l’application de l’exception relative à la sécurité nationale prévue par la Loi. Il faut veiller à appliquer la Loi telle qu’elle est rédigée, sans se fonder sur la classification d’un document.
- Les conseils fournis par le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) sur le déclassement des documents gouvernementaux ne sont pas contraignants. Leur incidence sur le travail de déclassification sera faible.
- Un projet pilote sur la déclassification a été marqué comme achevé en 2022 : aucun document n’a été déclassifié à la suite de ce projet.
Déficit budgétaire
Le mois dernier, vous avez mentionné que le Commissariat à l’information est aux prises avec un déficit structurel. Vous avez parlé d’une réduction budgétaire représentant un montant annuel de 375 000 $. Pourquoi ces chiffres ont-ils changé en quelques semaines?
- Les modifications apportées à la Loi sur l’accès à l’information en 2019 ont entraîné de nouvelles responsabilités pour le Commissariat et une augmentation de ma charge de travail.
- En décembre 2020, à la suite de ces modifications et d’une augmentation continue des plaintes déposées auprès du Commissariat, celui-ci a reçu un financement permanent pour 27 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires afin d’assurer la viabilité du programme des enquêtes.
- En avril dernier, en examinant le financement affecté à l’application des nouvelles conventions collectives, nous avons découvert que le SCT n’avait pas fourni les fonds pour couvrir les augmentations salariales de ces enquêteurs. Par conséquent, le Commissariat se retrouve avec un manque de financement considérable.
- Le 3 mai, la convention collective du groupe Praticien du droit (LP) a été renouvelée.
- Au moment où le SCT avait recueilli l’information sur laquelle reposait le calcul du financement requis pour la nouvelle convention collective de ce groupe, certains dossiers salariaux n’étaient pas entrés dans le système de paye Phénix, et ils n’ont donc pas été inclus dans le calcul.
- Comme ces avocats travaillent toujours au Commissariat, cette omission entraînera un manque à gagner supplémentaire de 350 000 $ pour le Commissariat.
- Nous avons maintenant un manque à gagner de 700 000 $, ce qui représente une réduction d’environ 5 % de mon budget.
- J’ai envoyé une lettre à la secrétaire intérimaire du Conseil du Trésor pour lui expliquer la situation et lui demander son aide en vue de la résoudre.
- J’envisage la possibilité de recourir à un redressement budgétaire en dehors du cycle prévu à cet effet, par l’entremise du ministre de la Justice.
- C’est la seule option dont je dispose dans le cadre du modèle de financement actuel pour le Commissariat.
- Sachant que les deux dernières demandes budgétaires présentées au ministre de la Justice afin de régler l’arriéré ont été ignorées, je ne suis pas très optimiste.
Pouvez-vous réaffecter des ressources au sein de votre organisation pour résoudre la situation?
- En ce moment, presque tous les postes au Commissariat sont pourvus, ce qui laisse peu de marge de manœuvre pour une réaffectation au sein de l’organisation.
- Seulement 14 % de notre budget est affecté au fonctionnement et à l’entretien. Par conséquent, nous ne disposons pas de beaucoup de souplesse pour absorber les réductions de financement sans que les fonctions de base soient touchées.
- Comme l’a communiqué le SCT, le Commissariat était exclu de l’initiative Recentrer les dépenses gouvernementales de 2023.
- À mon avis, cette décision reflète mon rôle critique d’agente indépendante du Parlement qui veille à ce que le droit d’accès à l’information continue d’être respecté.
- Le fait que les institutions ne se conforment pas à mes ordonnances entraîne la mobilisation de mes ressources au même titre que celles des institutions appelées à déployer leurs propres services juridiques pour mener à bien ce type d’instances.
Le Commissariat envisage-t-il de recourir à l’intelligence artificielle ou à d’autres outils afin d’être plus efficace malgré le manque de ressources?
- Depuis le début de mon mandat, je priorise l’amélioration des activités opérationnelles au Commissariat.
- Nous sommes toujours à la recherche d’outils nous permettant d’être plus efficaces, mais nous mettons aussi nos processus à jour de manière à travailler plus intelligemment.
- Par exemple, en 2023-2024, le Commissariat a procédé à une importante mise à jour de son formulaire de plainte en ligne.
- Le nouveau formulaire offre des fonctionnalités qui aident les parties plaignantes à déposer leurs plaintes. Il leur permet de fournir davantage de renseignements d’emblée, ce qui nous permet de prendre des décisions éclairées quant à la recevabilité des plaintes.
- Récemment, nous avons cherché à connaître, par l’entremise d’un tiers indépendant, le point de vue des parties plaignantes pour mieux comprendre leurs besoins. Des mesures supplémentaires sont prévues pour combler les lacunes relevées, notamment d’améliorer notre site Web.
Exécution des ordonnances
Au cours de la dernière année, vous avez présenté quatre demandes de mandamus devant la Cour fédérale, dont trois contre le MDN. Que pouvez-vous nous dire au sujet de ces demandes?
- Les ordonnances que je rends ont force obligatoire. Une institution est tenue de se conformer à mon ordonnance, à moins d’exercer, devant la Cour fédérale, un recours en révision. Le MDN n’a fait ni l’un ni l’autre.
- Il est malheureux que j’aie dû recourir à une demande de mandamus. Il n’est pas nécessaire de recourir à ce type de procédure pour obliger les parties à se conformer à mes ordonnances.
- La toute première demande de mandamus que j’ai présentée était contre Trans Mountain Corporation.
- L’une des trois demandes de mandamus contre le MDN a été annulée puisque le Ministère a finalement décidé de se conformer à mon ordonnance. Quant aux deux autres demandes, elles sont toujours en cours.
- Étant donné que la Cour est saisie de ces affaires, je vais m’abstenir de tout autre commentaire.
Avez-vous l’intention de présenter d’autres demandes de mandamus contre des institutions?
- Si le recours au mandamus constitue le seul moyen d’obtenir le résultat escompté, je continuerai à suivre la même approche pour obliger les parties à se conformer à mes ordonnances.
- Cette situation entraîne la mobilisation de mes ressources au même titre que celles des institutions appelées à déployer leurs propres ressources juridiques pour mener à bien ce type d’instances.
- Vu le contexte économique actuel, je suis persuadée que la population canadienne s’accorderait à dire que ce type de dépense n’est pas nécessaire.
Combien d’institutions décident de contester vos ordonnances devant la Cour ou de ne pas s’y conformer?
- La non-conformité aux ordonnances est une préoccupation parce que celles-ci ont force obligatoire.
- Jusqu’à présent, j’ai présenté quatre demandes de mandamus devant la Cour fédérale contre deux institutions différentes.
- Le respect de la Loi est au cœur de mon mandat. Voilà pourquoi j’ai décidé d’intenter ces procédures judiciaires.
Devrait-on prévoir des sanctions pour les institutions qui ne se conforment pas à la Loi et à vos ordonnances?
- Les parlementaires pourraient se pencher sur cette question.
- La nouvelle Loi sur les langues officielles prévoit de telles sanctions.
- À tout le moins, il faudrait que les fonctionnaires, y compris les hauts fonctionnaires, inscrivent dans leurs objectifs de travail le fait qu’ils doivent respecter leurs obligations au titre de la Loi sur l’accès à l’information.
Allégations - destruction de documents
Lors de votre dernière comparution devant le Comité, nous avons discuté d’allégations concernant la destruction de documents visés par des demandes d’accès. Pourriez-vous faire le point sur cette affaire ainsi que sur votre enquête sur l’application ArriveCAN?
- Deux articles de la Loi sur l’accès à l’information prévoient des infractions criminelles : l’article 67, qui interdit d’entraver les enquêtes, et l’article 67.1, qui interdit de détruire, modifier, falsifier ou cacher des documents dans l’intention d’entraver le droit d’accès.
- Bien que je ne puisse enquêter sur l’intention derrière la destruction de documents, je peux enquêter sur la destruction elle-même en tant que refus de communication.
- Je n’ai pas compétence pour faire enquête sur des infractions criminelles. Suivant le paragraphe 63(2), je peux seulement faire part de l’information au procureur général s’il existe des éléments de preuve touchant la perpétration possible d’une infraction par un administrateur, un dirigeant ou un employé d’une institution fédérale.
- Par le passé, le Commissariat a transmis de tels renseignements cinq fois au procureur général.
- 25 mars 2010 – dossier concernant la destruction de documents au Musée des beaux-arts du Canada;
- 26 mars 2015 – dossier concernant la destruction, par la Gendarmerie royale du Canada (GRC), de documents du registre des armes d’épaule;
- 30 mai 2017 – dossier concernant la suppression de courriels à Services partagés Canada;
- 10 septembre 2018 – dossier concernant une obstruction possible au droit d’accès à la GRC;
- 27 février 2019 – dossier concernant la dissimulation de documents par le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes.
- Je ne suis pas au courant de poursuites qui auraient été intentées à la suite d’une dénonciation faite par le Commissariat.
- Il est important de noter que deux autres enquêtes ont permis à la commissaire de l’époque de conclure à des cas d’ingérence dans certains dossiers. Ceux-ci n’ont pas pu être déférés au procureur général en vertu du paragraphe 63(2) de la Loi, car les individus visés n’étaient pas des dirigeants ou des employés d’une institution fédérale :
- 11 mars 2011 – dossier concernant un cas d’ingérence politique par un membre du personnel du cabinet de la ministre quant à un document à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada;
- 10 avril 2014 – dossier concernant un cas d’ingérence politique par un groupe de membres du personnel ministériel, de 2008 à 2010.
- Quant à mon enquête sur la demande ou l’obtention de documents concernant ArriveCAN, elle est en cours. Je ne peux donc commenter l’enquête en question.