2010 Le régime de consultation à l’étranger
La problématique des consultations auprès des gouvernements étrangers répond à des considérations légales et à des impératifs d’ordre règlementaire. Elle se double aussi de procédures administratives qui achèvent de lui conférer une place très particulière dans le régime d’accès à l’information tel que structuré au Canada.
Dans la presque totalité des lois en matière d’accès à l’information, un traitement particulier est réservé aux demandes de documents qui peuvent avoir un impact sur les relations internationales de l’État. Le Canada n’échappe pas à ce qui constitue presque une règle. L’objectif des dispositions établies à cette fin est d’assurer le maintien de relations harmonieuses entre les Pays et aussi avec les organisations internationales. S’inscrivent aussi dans cette préoccupation les questions liées à la sécurité nationale.
Dans la loi de 1982, les dispositions en matière de relations internationales, au sens large du terme, sont relativement bien cadrées. L’ensemble des documents communiqués ou confiés au gouvernement canadien par un autre gouvernement ou une organisation internationale est soumis à une exception impérative : ils ne peuvent être remis à un demandeur, à moins du consentement explicite du gouvernement ou de l’organisation en question (art. 13). Le gouvernement dispose d’un pouvoir discrétionnaire en ce qui a trait aux documents relatifs aux questions de défense, de sécurité nationale et aux correspondances d’ordre diplomatique avec un autre État, de même qu’aux négociations internationales (art. 15).
Le législateur a entouré d’une procédure particulière la révision d’une décision rendue en vertu de l’un ou l’autre de ces deux articles. En spécifiant (art. 52) la qualité du juge en chef de la Cour fédérale qui peut entendre pareille demande de révision, il consacre en quelque sorte le caractère exceptionnel de ce type de documents. C’est exactement de la même façon que doivent s’interpréter les modalités d’intervention du commissaire à l’information lorsque saisi d’une plainte dans ce domaine (art. 59(2)).
On peut sans doute affirmer que la notion de consultation est implicite dans la disposition qui permet au gouvernement – en fait au MAECI – de rendre accessible certains documents lorsque l’État étranger ou l’organisation internationale y consent. Le ministère a mis au point toute une série de procédures pour prendre en charge cette dimension du traitement des demandes d’accès qui lui sont directement adressées.
Le régime de consultations, puisque c’est de cela dont il s’agit, a été en fait élargi par un règlement émis par le Secrétariat du Conseil du Trésor, voilà plus de 17 ansNote de bas de page 13. En vertu de ce règlement, tout ministère ou organisme saisi d’une demande d’accès qui vise une dimension ou l’autre des relations internationales doit s’en remettre au MAECI. C’est à ce ministère et à lui seul qu’incombe la décision d’engager, ou non, une démarche à ce sujet auprès d’un autre État ou d’une organisation internationale. Il s’agit d’ailleurs là d’une prérogative clairement réaffirmée par le ministère à la suite d’une demande émanant du ministère de la Défense nationale qui, en 1997, souhaitait traiter directement avec son homologue des États-UnisNote de bas de page 14.
Le MAECI ne recourt au processus de consultation à l’étranger qu’après un examen détaillé des demandes de documents dont l’impact sur les relations internationales du Canada est considéré comme une possibilité sérieuse. Il y a donc tamisage de ces dossiers en fonction de critères établis de façon très précise et codifiés dans des procédures suivies par le personnel de la direction de l’accès à l’informationNote de bas de page 15. Ainsi, le MAECI ne consulte pas certains gouvernements en raison de l’attitude présumée de ces paysNote de bas de page 16.
Le MAECI est amené à engager des consultations à l’étranger aussi bien au regard des demandes d’accès à l’information qui lui sont directement destinées que pour les requêtes en provenance d’autres ministères et organismes. A l’inverse, il est aussi sollicité par des gouvernements étrangers qui vivent également sous un régime d’accès à l’information grevé de dispositions relatives à l’état des relations internationales.
En fait, le régime de consultations à l’étranger se double d’une autre obligation que le MAECI doit assumer en vertu de la même directive du Secrétariat du Conseil du Trésor, mais cette fois-ci en regard de la Loi sur la protection des renseignements personnels Note de bas de page 17. En fonction du même objectif, la préservation de relations harmonieuses avec les autres Pays ou les organisations internationales, le ministère peut alors décider de procéder à des consultations à l’étranger en matière de renseignements personnels. Cette procédure vise aussi bien les demandes de renseignements personnels adressées au ministère que les dossiers en provenance des autres ministères et organismes.
Ce processus est relativement complexe. Il implique un nombre important d’acteurs dont l’intervention correspond en fait aux différentes étapes de cette consultation. On peut le schématiser de la façon suivante (Graphique 1).
Version texte
Le graphique 1 illustre les étapes des consultations menées par le MAECI auprès de gouvernements étrangers pour le compte de ministères et organismes. Le processus des consultations suit les étapes suivantes :
- Les ministères et organismes du Canada font une consultation initiale avec le MAECI .
- Le MAECI transmet la demande de consultation à la Mission diplomatique du Canada.
- La Mission diplomatique du Canada transmet la demande de consultation au ministère des Affaires étrangères du pays consulté.
- Le ministère des Affaires étrangères du pays consulté peut possiblement consulter certains ministères et organismes du pays consulté.
- Le ministère des Affaires étrangères du pays consulté transmet le résultat de la consultation à la Mission diplomatique du Canada.
- La Mission diplomatique du Canada transmet le résultat de la consultation au MAECI .
- Le MAECI transmet le résultat de la consultation aux ministères et organismes du Canada.
En un mot, il s’agit d’une charge importante et relativement lourde assumée par le MAECI au nom de l’ensemble des composantes de l’appareil gouvernemental canadien.
Notes de bas de page
- Note de bas de page 13
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Secrétariat du Conseil du Trésor (1993) – Accès à l’information et protection des renseignements personnels Exceptions-Généralités, Ottawa : para 9.
- Note de bas de page 14
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Note interne signée, le 22 décembre 1997 par Michael C. Welsh, director, U.S. General Relations Division. « We believe that this proposal would significantly erode DFAIT’s responsibility for pursuing, on behalf of all governement departments, consultation with the U.S. prior to the release of documents which could be expected to be injurious to the conduct of international relations ».
- Note de bas de page 15
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A VENIR
- Note de bas de page 16
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« Some foreign governments, such as China, India, Korea and perhaps others, may object to being consulted on their records. They consider that the information was given in confidence and should remain confidential ». Document interne du MAECI. Reference document: Annexe H, Copy of study conducted re: sections 13 and 15.
- Note de bas de page 17
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Loi sur la protection des renseignements personnels, R.C. 1985, ch. P-21.